« Je ne sais vraiment pas comment cette histoire a commencé.
Papa nous avait pourtant tout expliqué, un jour, dans la camionnette.
– Vous voyez, au Burundi c’est comme au Rwanda. Il y a trois groupes différents, on appelle ça les ethnies. Les Hutu sont les plus nombreux, ils osnt petits avec de gros nez.
– Comme Donatien ? j’avais demandé.
– Non, lui, c’est un Zaïrois, c’est pas pareil. (…) Il y a aussi les Twa, les pygmées. Eux, passons, ils sont quelques uns seulement, on va dire qu’ils ne comptent pas. Et puis, il y a les Tutsi, comme votre maman. «
Ainsi débute « Petit pays » de Gaël Faye, un livre dont on a beaucoup parlé ces deux dernières années – et qui le mérite. Car, pour un premier roman, c’est non seulement une réussite mais c’est aussi une pépite d’écriture – et ça, ça fait du bien…
« En 1992, Gabriel, dix ans, vit au Burundi avec son père français, entrepreneur, sa mère rwandaise et sa petite sœur, Ana, dans un confortable quartier d’expatriés. Gabriel passe le plus clair de son temps avec ses copains, une joyeuse bande occupée à faire les quatre cents coups. Un quotidien paisible, une enfance douce qui vont se disloquer en même temps que ce « petit pays » d’Afrique brutalement malmené par l’Histoire.
Gabriel voit avec inquiétude ses parents se séparer, puis la guerre civile se profiler, suivie du drame rwandais. Le quartier est bouleversé. Par vagues successives, la violence l’envahit, l’imprègne, et tout bascule. Gabriel se croyait un enfant, il va se découvrir métis, Tutsi, Français… »
Gaël Faye relate non seulement non seulement les débuts d’ une guerre civile (Tutsi/Hutu) mais dépeint aussi l’Afrique, au travers d’un roman d’apprentissage.
« Je pensais au jour d’après, espérant que demain serait mieux qu’hier. Le bonheur ne se voit que dans le rétroviseur. Le jour d’après ? Regarde-le. Il est là. A massacrer les espoirs, à rendre l’horizon vain, à froisser les rêves.
Magnifique lecture sur l’enfance, sur l’Afrique, sur le métissage, et tant d’autres sujets, Petit pays est servi par une écriture lumineuse et ciselée.
Pour ma part, j’ai été d’autant plus conquise que j’ai travaillé plusieurs années avec des collègues venu.e.s du Rwanda et du Burundi qui, après avoir vécu l’horreur, transmettait une confiance dans l’espoir rarement vue ailleurs.