Londres, 1941. À vingt-quatre ans, Emmy n’a qu’un rêve : devenir reporter de guerre. Un rêve qui semble sur le point de se réaliser lorsque la jeune femme décroche un poste au London Evening Chronicles. Enfin, Emmy va pouvoir entrer dans le vif du sujet, partir sur le front, se faire un nom au fil de la plume ! Las, c’est un poste d’assistante à la rédaction du magazine féminin Women’s Day qui lui est offert. La mission d’Emmy : répondre aux courriers des lectrices adressés à Mrs Bird, la rédactrice en chef du journal. Mais attention, la terrifiante Mrs Bird est très stricte, et seules les demandes les plus vertueuses se verront offrir une réponse expéditive dans le poussiéreux journal. Un cas de conscience pour la jeune journaliste qui refuse de laisser ses concitoyennes en mal d’amour et de soutien amical, errer dans les limbes en raison du diktat imposé par une vieille conservatrice bon teint. Et Emmy a un plan pour outrepasser l’autorité de Mrs Bird…
C’est en tombant par hasard sur un exemplaire d’un magazine féminin de 1939 que l’autrice AJ Pearce a eu l’idée en 2012 du roman « Chère Mrs. Bird« .
Depuis, ce premier roman a fait son chemin puisqu’il est publié et traduit un peu partout dans le monde – surfant sur une vague feelgood à la » Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates ». Une adaptation est même prévue pour la TV anglaise .
A priori, c’est une lecture qui me plaisait – même si le côté feelgood à tout prix commence vraiment à me porter sur les nerfs.
A posteriori, mon avis est beaucoup plus mitigé que je ne l’aurais souhaité en lisant les premiers chapitres.
Certes, l’intrigue n’est pas ici pour que le lecteur se fasse mal aux neurones. Mais le tout est très bien renseigné; ce n’est pas un hasard si AJ Pearce est diplômé en Histoire; il y a là un vrai travail de documentation.
Mais ce n’est pas ce qui m’a chagrinée.
En premier lieu, il y a une abondance de l’emploi des majuscules qui tend sérieusement à ralentir le rythme de la phrase. L’autrice a ici un désir de souligner de façon exagérée le sens de certains mots ou certaines expressions :
ex: » – Vous N’Etes Pas Renvoyée, a dit Lord Overton,a rticulant chaque mot comme s’il s’adressait à une attardée. »
Bingo ! C’est à peu près l’effet que m’a donnée la lecture de certains passages (« j’ai compris, c’est un effet comique, mais peux-tu arrêter un instant ….trop c’est trop » me suis-je dit plusieurs fois).
autre ex: « L’expression de Mrs. Bird signifiait clairement Mais Dans Quel Etat Etes-vous? mais elle a fulminé en silence » – et j’ai fulminé en même temps….
Comment dire, sinon que la répétition de cet effet tue complètement l’effet en lui-même – et donc le comique. Ou bien : trop de Majuscules Tuent Les Majuscules.
Et j’en viens aux personnages. La fameuse Mrs.Bird , une admirable caricature de mégère, est bien campée – j’avais dans la tête l’image de la grand -mère de Neville dans Harry Potter, Augusta Longdubat, robe verte, étole de renard, chapeau orné d’un vautour empaillé et sac-à-main rouge !
Quant à Emmeline Lake, la narratrice, si elle montre un grand courage, elle a peu de consistance, se contentant trop souvent de se comporter en charmante cruche, un peu bornée. Je veux bien croire au « elle est le fruit de son éducation/de son époque » mais de là à en faire une telle écervelée…
Heureusement que toutes les femmes ayant la vingtaine dans les années 40 n’étaient pas aussi gourdes, j’en veux pour preuve mes propres grands-mères qui étaient d’une autre trempe et dont les parents n’appartenaient pas à la classe aisée.
(Ici, la grand-mère et la mère d’Emmy ont été des suffragettes tandis que son père est un médecin)
Néanmoins, on ne peut reprocher à AJ Pearce d’avoir décrit des lâches. Les femmes sont aussi courageuses et importantes que les hommes, aucun problème à ce sujet.
Je passe sur la facilité de l’intrigue, l’évident dénouement et la fin un brin bâclée.
Le meilleur du roman réside dans les lettres envoyées au courrier de Mrs. Bird et dans la réaction inappropriée de Henrietta Bird. Ces passages sont certainement les plus touchants de réalisme, de comique, de tendresse du livre.
Ici, AJ Pearce lit un extrait (les lettres):
En conclusion, « Chère Mrs.Bird » est une lecture sans prise de tête, qui pour ma part rime un peu trop avec une certaine vision de l’Angleterre qui se vend bien ( le « so british » ).
C’est sans doute ce que je retiendrais de ce livre: insipide. Gentil mais sans saveur.
A emmener en vacances, peut-être ?