Premières lignes – 21 septembre

Premières lignes 

« Le grand Achille. Le brillant Achille, le bouillant Achille, le divin Achille… Comme les épithètes s’accumulent ! Nous ne l’appelions jamais par aucun de ces noms ; nous l’appelions « le boucher ».
Achille au pied léger. Voilà qui est plus intéressant. « 

Le silence des vaincues est un livre que je voulais lire depuis plusieurs mois – et pour cause : c’est une réécriture de la guerre de Troie, de point de vue de Briséis.
Je dois dire que j’ai un faible pour ce genre de réécriture (quand elles sont bien faites). J’ai aimé suivre Cassandre dans La trahison des dieux (malgré les défauts du roman de MZ Bradley) ou Andromaque dans Troie de David Gemmell (le personnage est formidable dans la trilogie de Gemmell).
Bien sûr, d’une autre façon, Le chant d’Achille est un roman remarquable. Mais Madeline Miller sait revisiter l’Antiquité comme personne…
Ici, on suit surtout Briséis qui sera le fil conducteur et le principal point de vue — hélas, pas le seul. Arrachée à sa vie, kidnappée, elle connaît le même sort que les autres femmes : elle devient le trophée d’Achille qui la regarde à peine, la met dans son lit et se sert d’elle. La guerre est déjà bien entamée et le camp des Grecs a eu le temps de s’installer sous les remparts de Troie. Il existe une organisation bien rôdée.
Les soldats et les chefs de guerre ont leurs « femmes »,  celles qu’ils ont réduites en esclavage en faisant des incursions dans les terres aux alentours. Ils les côtoient, les malmènent. Certains semblent mener un simulacre de vie domestique. On partage la cabane/la tente, des  enfants naissent. Les femmes exercent des « professions » : elles aident à l’infirmerie, à la cuisine, etc…
Et pourtant, ces femmes n’ont aucun statut, aucun droit. A tout moment, elles peuvent être données/vendues à un autre, blessées, violées, tuées.
Briséis, une jeune femme qui fut reine, connaît la même vie ainsi que ses camarades. Achille, quant à lui, est un monstre d’égoïsme. Et, à la fois, il est dépeint comme un fils qui recherche sa mère.
Le roman est assez immersif sans voyeurisme pour autant. L’autrice ne s’appesantit pas sur les viols, sans les nier non plus. C’est donc bien dosé : pas de descriptions malsaines. Mais la réalité des violences, le climat lourd, la présence de la guerre, tout cela reste présent.
L’importance du silence des femmes, du fait que Briséis n’a pas voix au chapitre, est bien rendu. Le seul bémol, à mon sens, réside dans le choix de l’autrice de basculer à un moment vers le point de vue d’Achille (alors qu’elle avait privilégié le point de vue de Briséis). L’effet n’est pas très cohérent et, surtout, n’amène pas grand chose au roman, au contraire. En gros, on n’a pas envie de savoir ce que pense ou ressent l’un des bourreaux, les indices nous étant donnés via le ressenti et la vision de Briséis.
C’est un peu dommage même si cela n’entrave pas la lecture.
Un bon roman, donc.

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3 réflexions sur “Premières lignes – 21 septembre

      • En effet, j’avais déjà vu passer ce point dans d’autres chroniques – et ça ne gêne en rien mon envie de découvrir « Le silence des vaincues » ! Je crois même (j’espère) que je l’apprécierai plus car je sais à quoi m’attendre de ce côté ^^

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