Premières lignes – 21 mars

Premières lignes 

 » Si vous ne lisez qu’un document parmi ceux que nous avons envoyés, que ce soit celui-ci. Je vous le demande en sachant fort bien que je déroge à mes convictions profondes. c’est dans les rapports que se trouvent nos conclusions scientifiques, et c’est ici la science le plus important, de loin. Mon équipage et moi sommes secondaires. Tertiaires, même.
Malgré tout, il est capital pour nous que quelqu’un reçoive ceci.

Ne vous pressez pas. Ce fichier aura mis quatorze ans à atteindre la Terre et, si nous avons la chance que quelqu’un le lise immédiatement et réponde sans tarder, il repartira pour quatorze autres années. Donc, bien que nous ne puissions pas attendre éternellement, l’urgence est ici relative, comme souvent dans les voyages intersidéraux.
Vous pourriez lire la fin directement, c’est vrai. Vous ne seriez pas le premier et, honnêtement, c’est là que se trouvent les observations les plus lourdes de conséquences. Et peut-être, si vous savez déjà qui nous sommes et ce que nous faisons, si vous êtes de ceux qui nous ont envoyés ici, vous comprendrez quand même. Pourtant, je pense que le pourquoi de notre requête est important. Naturellement, je ne suis pas objective, et pour deux raisons : non seulement ce rapport parle de mon équipe et de moi, mais nous sommes des scientifiques. Les pourquoi sont notre raison d’être.
Cela fait cinquante ans que nous avons quitté la Terre, et je ne sais pas quels yeux et quelles oreilles mon message a trouvés. J’ignore à quel point une planète peut changer en l’espace d’une vie. « 

Je ne vais pas le cacher : j’aime ce qu’écrit Becky Chambers et ceci depuis L’espace d’un an. On qualifie souvent sa SF de « positive » ou solar punk  ; oui, et tant mieux. Je n’avais pas encore eu l’occasion de lire Apprendre si par bonheur, une très (trop) courte novella sous forme de journal écrit à la 1ère personne. Le titre qui m’intriguait (To be taught, if fortunate) est une citation de l extrait d’un message du  secrétaire général de l’ONU envoyé  à bord de la sonde Voyager, en 1977.
Nous suivons un petit équipage, au début du XXIIème siècle, constitué d’une poignée de scientifiques, en mission d’exploration. Ils et elles vont se poser sur différentes exo planètes où la présence de la vie a été détectée.  Le journal est écrit pat Ariadne O’Neill, ingénieure de vol. Elle sait qu’ils doivent attendre de nouvelles instructions en provenance de la Terre dès que leur mission sera accomplie. Mais, de nombreuses années se sont écoulées sur Terre… Absorbé par leur travail sur les différentes planètes, l’équipage ne se rend pas tout à fait compte du temps qui passe ni du fait que…plus personne ne les informe. La Terre ne répond plus !

Ce petit ouvrage est à la fois instructif sans être pénible (l’autrice explique comment elle a récolté ses informations scientifiques à la fin), et reste un bijou de délicatesse comme Chambers sait les concocter. Le reproche que je peux faire, c’est la longueur : j’aurais tellement aimé lire un texte plus long…

Apprendre, si par bonheur... par Chambers

 

Je vais pouvoir le rajouter au Challenge de l’Imaginaire qui, pour moi, n’avance pas beaucoup cette année, fatigue et panne de lecture assez présentes.

 

 

 

Premières lignes – 1er mars

 

Premières lignes 

 » Nous ne voulons pas que le talent soit une fiction.
Nous sommes obstinément persuadés que certains facultés tiennent d’une poignée d’humains au-dessus de la moyenne, d’un hasard extrêmement rare, ou d’un grâce divine, pour ceux d’entre nous qui y croient. Le talent est perçu comme un don rare, mystique, réservé à quelques élus, qui pourraient l’exploiter pour créer des chefs-d’oeuvre sans effort. « 

 

J’avais repéré cet essai grâce à une émission TV : l’autrice, docteure en neurosciences, expliquait clairement, par exemple, que certaines théories prônaient la pratique  à tout prix qui permettrait « d’accéder au talent » . J’en avais entendu parler : 10 000 heures de pratique permettraient à n’importe quelle personne de développer une expertise dans un domaine. J’avoue que j’ai toujours trouvé ça un peu louche…
J’étais donc curieuse de savoir où en étaient les recherches dans le domaine.

Le livre de Samah Karaki est découpé en trois grandes parties qui explorent différentes pistes. La première s’attache à la thèse qui voudrait que le talent ne soit dû qu’à la génétique (héritage génétique ou socio-économique ? l’influence de la culture sur les apprentissages, la racialisation  et, enfin, le problème des tests de QI ).
on s’en doutait : les gênes, seuls, n’expliquent pas le talent. On apprend aussi qu’il existe plus de probabilités de « réussir » lorsqu’on grandit dans des conditions favorables.
Mais l’autrice tient à parler de l’importance du travail, de la pratique. Après tout, la notion d’effort doit bien contribuer à quelque chose, non ? Il y a dans ce long chapitre des éléments très intéressants. Je ne vais pas le résumer mais on comprend, entre autres, que ce n’est pas tant la quantité du travail fourni (les fameuses 10 000 heures) mais la qualité qui importe. C’est évident ? Et bien, pas pour tout le monde, pas dans l’univers de la réussite, apparemment.
Enfin, l’autrice aborde l’effet des prophéties auto-réalisatrices et des croyances : sur la perception de l’effort et de l’échec.
Finalement, en fin d’ouvrage, c’est la notion même de réussite qui est à remettre en question (scolaire, professionnelle), non pas comme un appel à laisser tomber les efforts ou la ténacité, ni même le développement des connaissances mais comme celui à reconnaître que nous sommes divers, complexes, avec des ambitions différentes. L’accent devrait alors être mis sur un changement du système scolaire et même professionnel qui vise toujours l’excellence de la même manière, et reste peu adapté aux intelligences diverses qui sont les nôtres.

Je vous invite à découvrir cet essai dense, parfois ardu et  très bien documenté que je n’ai fait que survoler ici.

(merci aux éditions JC Lattès et Babelio)

Le talent est une fiction par Karaki

 

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Premières lignes — 21 février

Premières lignes 

 » Mars 1942 –
la pièce était fermée depuis une semaine ; le store de calicot à la fenêtre sud donnant sur le jardin de devant avait été baissé ; une lumière couleur parchemin baignait l’air froid et confiné. Polly gagna la fenêtre et tira le cordon . Le store se releva dans un claquement sec et la pièce s’éclaircit pour se parer d’un gris sans chaleur, plus pâle que le ciel tourmenté envahi de nuages. Elle demeura un moment à la fenêtre. Des touffes de jonquilles se dressaient avec exubérance sous le désespoir des singes , attendant d’être noyées et malmenées par les giboulées de mars. Elle alla à la porte et poussa le verrou. La moindre interruption serait insupportable. « 

Elizabeth Jane Howard a un talent de grande conteuse ; avec sa saga des Cazalet, elle poursuit la fresque de la famille étendue durant la Seconde guerre mondiale, en Angleterre.
Au cours du second tome, bien nommé en français A rude épreuve, nous avons suivi les trajectoires des trois frères Cazalet : Hugh, l’aîné, blessé lors de la 1ère guerre mondiale, travaille dans l’entreprise familiale  avec ses deux frères, et a perdu son grand amour et femme Sybil d’un cancer. Le couple a eu trois enfants, Polly, Simon, et le dernier, William (Wills) né avant-guerre. Polly, l’aînée,  va prendre son indépendance dans le tome 3. Elle est devenue très amie avec sa cousine, Clary,  fille de Rupert, le plus jeune des frères Cazalet. Rupert était peintre et a décidé sous l’influence de sa jeune épouse Zoé, de renoncer à sa carrière peu rémunératrice pour prendre des responsabilités dans l’entreprise de bois. Il est le père de Clary et Neville, dont la mère est décédée il y a longtemps et de Juliet, qu’il a eue avec Zoé. Mobilisé durant la seconde guerre alors qu’il  était trop jeune lors de 14-18, il est bientôt porté disparu.
Edward,  le plus fidèle à la tradition familiale, chef d’entreprise est marié à Viola (Villy) et la trompe largement depuis des années. Mais il a une maîtresse  cachée et régulière, Diana. Il est mobilisé aussi mais ne participe pas aux combats. Il est le père de Louise, qui vient de se marier à Michael, un portraitiste à succès plus âgé qu’elle, de Teddy qui finit sa scolarité, de Lydia et du petit Roland.
Enfin, Rachel est la seule fille. Elle n’est pas mariée et s’occupe des « anciens », la Duche, sa mère et les deux soeurs de celle-ci, ainsi que du  Brig, sonpère des trois frères, devenu aveugle mais ne voulant pas perdre pied ; il compte sur sa fille pour tout.  Rachel est habituée à rendre service aux autres, au détriment de sa santé et de sa vie personnelle. Elle est amoureuse de Sid, son amie mais n’a jamais su braver sa famille pour s’installer avec elle.
La famille Cazalet est aisée et a l’habitude d’avoir des domestiques qui ne sont plus très nombreux avec la guerre.

Le tome 3  » Confusion » s’ouvre en 1942 et va se concentrer sur « les filles » : Clary et Polly habitent Londres et désirent prendre leurs distances avec les habitudes familiales. Louise se retrouve totalement à la merci de son mari, qui n’est pas si charmant que cela, et de sa belle-mère, une affreuse manipulatrice. Elle a 19 ans et elle est enceinte. Elle peut dire adieu à sa carrière d’actrice. Très vite, elle découvre que la vie de maman au foyer ne lui correspond pas mais ne sait pas comment se sortir de ce guêpier. Elle va aller de désillusion en espoir…
Zoé ne se sent guère mieux ; elle n’a reçu qu’un mot de Rupert, preuve qu’il est encore vivant, en France. Puis, plus rien. Elle le croit mort et finit par tomber amoureuse d’un américain…
Clary attend son père, elle. Elle a déjà perdu une mère, elle veut croire son père encore en vie. Peu à peu, elle s’accroche à l’amitié d’Archie, cet ami de son père un peu plus jeune.
Sid attend Rachel qui ne se décide toujours pas et elle finit par nouer une relation avec une jeune femme. Pourtant, elle déchante vite…
Edward s’attache de plus en plus à Diana qui est tombée enceinte. Le mari de celle-ci est tué au combat et Diana accouche d’une petite fille? Mais Edward ne se résout pas à parler à Villy…
Confusion, toujours.

Ainsi se passent ces années jusqu’après le débarquement.
Elizabeth Jane Howard choisit de mettre l’accent sur certains personnages — et je l’ai soupçonnée d’avoir des préférences (je la soupçonnais depuis le 1er tome, d’ailleurs). Clary, forcément, mais aussi Archie qui est le dépositaire des secrets de tout le monde, Louise, malmenée par les événements ; Zoé, à petites touches et, bien sûr, Rachel.

On passe un formidable moment avec ce troisième tome, très abouti, qui fait attendre le quatrième avec impatience.

La Saga des Cazalet, tome 3 : Confusion par Howard

 

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Premières lignes – 1 er février

Premières lignes ou plus exactement « premières cases » pour changer un peu.

 

 

Et oui, il s’agit du tome 8 de L’Atelier des sorciers. En fait, j’ai rattrapé mon retard (inexplicable) et j’ai lu d’affilée les 7, 8 et 9 (avec une relecture en diagonale du 6 parce que, le temps passant, j’avais oublié un peu certains détails).

Manga - Manhwa - Atelier des sorciers (l') - Collector Vol.8

Résumé « Après avoir réussi leur examen à l’Académie, Coco et les autres apprenties sorcières sont de retour à l’Atelier. C’est alors qu’arrive Tarta, qui propose à Coco et à ses amies de l’aider à tenir un stand lors du grand festival annuel des sorciers, la Fête de la Nuit d’argent. Excitées comme des puces à l’idée de prendre part à ces festivités, les petites sorcières entament les préparatifs. Alors que Coco accompagne Tarta voir son grand-père à l’hôpital, elle recroise le chemin de Kustas, le petit garçon qui s’était blessé lors de l’incident près de la rivière… »

 

Kamome Shirahama prend tout son temps, dorénavant. Et, si dans le tome précédent nous avions eu des révélations sur le passé de Kieffrey et son amitié avec Olugio (les deux maîtres sorciers de l’atelier), cette fois c’est une nouvelle orientation qui est pris.  Nous retrouvons Tarta, plus heureux et épanoui depuis qu’il s’est autorisé à devenir un sorcier mais aussi le jeune Kustas, qui s’était blessé lors de l’incident près de la rivière.
La mangaka s’attarde sur les origines de Kustas, son père adoptif, Dagda. Elle en profite pour aborder l’inégalité sociale, pour évoquer aussi la médecine (avec un parallèle avec la magie puisque les deux ont le but d’améliorer les choses. La question du handicap, via celui de Kustas, est présente.
En fait, j’ai quand même eu l’impression qu’on s’éloignait un peu de l’intrigue principale — Kamome Shirahama nous emmène effectivement sur des chemins tortueux et de traverse depuis quelques tomes — avec un peu moins d’intérêt dans ce huitième. J’ai un peu la crainte que la série ne s’allonge à cause de ces détails sans cesse rajoutés même si, d’un autre côté, j’aime beaucoup découvrir toutes les facettes de ce monde, de la magie et les nouveaux personnages.
Disons que ce tome 8 n’est peut-être pas le plus passionnant mais qu’il sème des éléments importants pour la suite (beaucoup de mystères ici et là)

Que dire d’autre sinon que sur le plan visuel, le résultat est toujours aussi somptueux ?  C’est un dessin que j’aime particulièrement. Et les éditions collector sont magnifiques, je confirme.
L’atelier des sorciers est une réussite ; vivement la suite !

 

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Premières lignes – 24 janvier

Premières lignes 

En voyant passer des articles sur la saga des Cazalet, je pensais, complètement à tort, qu’il s’agissait (encore) d’une série un peu mièvre, une histoire largement édulcorée façon Downton Abbey. Il n’en est rien et, au bout du premier tome, je peux dire que c’est tout le contraire (et c’est bien addictif).
« The light years », en français « Etés anglais » est le 1er volume d’une série de cinq (4 + 1 écrit 10 après les quatre premiers) qui commence en 1937 et s’achève en 1958.  On y suit la famille Cazalet, très aisée (entreprise de négoce de bois) avec les grands-parents Kitty ou  La Duche et William Cazalet alias le Brig qui accueille dans leur maison du Sussex, pour l’été 37, leurs trois fils, leurs épouses et leurs enfants. Il faut y rajouter les domestiques. La seule fille de la famille n’est pas mariée et vit avec ses parents.
De là, s’enchevêtrent les pensées via les différents points de vue des un.e.s et des autres pour brosser un tableau complet et complexe (l’arbre généalogique en début de volume est de toute utilité).
Elizabeth Jane Howard se révèle être une formidable autrice, sachant dépeindre tous ces personnages avec finesse, abordant des thèmes difficiles (comme l’inceste) ou plus surprenants chez des gens de cette classe sociale (l’amour entre deux femmes, l’asexualité, le consentement entre époux, la place de la femme). Les enfants tiennent une place importante ainsi que ceux et celles qui font partie de la domesticité.
L’ombre de la Première guerre n’est pas effacée (on la ressent au travers des différents traumas vécus par les fils de la famille) que  la Seconde s’annonce.

Un premier tome excellent pour entamer cette série.

La saga des Cazalet, tome 1 : Etés anglais par Howard

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Premières lignes – 16 janvier

Premières lignes 

 » Si vous demandez à six moines différents quel dieu règne sur la conscience des robots, vous obtiendrez sept réponses différentes.
La plus populaire, parmi le clergé comme chez les laïcs, affirme qu’il s’agit de Chal. De qui dépendraient les robots sinon du dieu des constructions ? « 

Dans ce monde, nommé Panga, il y a longtemps on a frôlé la catastrophe à cause des folies humaines (consommation, production, industrialisation à outrance). Mais voilà : les robots, qui ont accédé à la conscience, sont tous partis un jour, passant un pacte avec les êtres humains : qu’ils seraient toujours accueillis en paix s’ils revenaient. Le temps a passé. Les humains vivent en petits groupes, proches de la nature.  Les robots sont des mythes.
Dex est moine ; sa vie devrait être parfaite mais non ! Iel est en pleine crise existentielle. Que faire de sa vie ? Quel but lui donner ? Alors Dex va devenir moine de thé, un genre de moine qui arpente les routes et s’arrête dans les villages pour écouter les gens et leur offrir la tasse de thé/infusion qui convient à chaque personne. Au début, Dex a un peu de mal. Puis iel s’adapte. Une fois encore, sa vie devient formidable. Mais la sérénité n’est toujours pas là. Et Dex s’enfonce dans la nature profonde. Et un jour, c’est la rencontre : un robot ! Omphale a décidé de parler aux humains. De là, commencent des conversations passionnantes, des échanges émouvants. (« Tu n’as pas besoin de justifier ni de mériter ton existence, tu as le droit de te laisser vivre », souligne Omphale à Dex – comme ça sonne juste…)
Une fois encore, Becky Chambers fait mouche. J’ai particulièrement aimé ses trois romans (un beau coup de coeur pour « L’espace d’un an ») et j’ai retrouvé dans cette novella les mêmes qualités (ses personnages sont aussi excellents).
Un regret : que cela soit trop court !

 

Un psaume pour les recyclés sauvages par Chambers

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Premières lignes — 9 janvier

J’y arrive, voici les 1ères premières lignes de l’année 2023 !

 » Réveillez-le, ordonna James.
immédiatement, le matelot souleva le seau en bois et en jeta le contenu au visage de l’homme affalé et enchaîné devant eux.
L’eau fit l’effet d’une gifle à Marcus qui sortit alors l’inconscience en toussant et en reprenant bruyamment son souffle.
Même ruisselant, entravé et brutalisé, il conservait son port altier, tel le preux chevalier d’une tapisserie ancienne. Typique de l’arrogance des Stewards, pensa James. « 

Une lecture un peu facile pour commencer l’année avec de la fantasy qui ne va pas révolutionner le genre. Mais le roman se laisse lire.
L’intrigue se déroule à Londres, fin 19ème . Sur les quais, nous découvrons Will Kempen, adolescent qui semble mener une vie rude. Nous apprenons vite qu’il est en fuite et que  sa mère a été assassinée dans des circonstances mystérieuses. Très vite, l’action se met en place : Will est poursuivi, attrapé, délivré par Violet, une jeune fille de son âge, elle-même issue de la famille de ses ravisseurs. Mais les choses se compliquent lorsque le navire sur lequel est emprisonné Will est aussi attaqué par d’étranges combattants vêtus de blanc, qui semblent sortis d’une autre époque : les Stewards.
On apprend, une fois Will délivré, qu’il pourrait être « l’élu »  et le descendant de la Dame des Stewards, les défenseurs de la Lumière qui livrent un combat depuis de longs siècles contres les adeptes du Roi obscur, les Lions.
Le mal contre le bien, c’est un peu cliché mais c’est c’est une recette qui fonctionne bien.
Par contre, le livre est un peu long et l’action du début s’essouffle vite. Il faut attendre la toute fin pour assister à des rebondissements intéressants. Entretemps, il est un peu dommage que les personnages ne soient pas plus fouillés. Ils sont tous intéressants (Will, Violet ou la troisième, Katherine, largement négligée).
L’autrice a également tendance à se débarrasser des personnages secondaires (et hop, ils sont tous morts), ce qui ne laisse plus grand monde pour interagir vers la fin du roman.
Là aussi, j’ai regretté ce genre de choix.
Malgré cela et des maladresses dans l’écriture des points de vue parfois, j’ai passé un moment plutôt agréable même si je ne suis pas certaine de bien me souvenir du livre dans quelques mois…

Dark Rise, tome 1 par Pacat

 

 

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Premières lignes – 28 déc

Les dernières premières lignes de l’année :

« Dans la nuit du 22 septembre 1972, un vent mauvais arriva du Sahara et recouvrit Alger d’une poussière rouge qui se déposa sur les façades des immeubles, les toits des voitures, les feuilles des palmiers et les parasols des plages. « 

Pas de fantasy ni de Sf, mais un roman sorti pour la rentrée littéraire de cette année : Au vent mauvais de Kaouther Adimi  suit Leïla, Tarek et Saïd des années 1920 aux années 90. Tous les trois ont grandi dans un village de l’est de l’Algérie, El Zahra (qui signifie : fleur, à l’origine, mais aussi blanche, lumineuse). Tarek et Saïd viennent de familles très différentes mais sont frères de lait. Enfants, ils partagent tout avec Leïla. Mais étant une femme, on les épare et Leïla est mariée contre son gré. Tarek devient berger, il ne reçoit pas d’éducation. Saïd, lui, va poursuivre des études et devient écrivain. Leïla décide de se séparer de son époux, un homme qu’elle n’aime pas, et le quitte malgré la pression du village, son fils sous le bras.
Tarek part à la guerre, là-bas, en Europe. Quand il revient,  il a changé. Mais il aime toujours Leïla qui accepte de l’épouser.
L’Histoire est en chemin : l’indépendance, puis l’immigration en France pour Tarek, ensuite, l’Italie afin de faire vivre sa famille. Les trois vies se croisent, se racontent en parties distinctes, en points de vue distincts. (Tarek, Leïla, Saïd)

« Moi j’ai fais deux fois la guerre, deux fois je suis rentré chez moi mais je suis plein de poussière et je n’arrive pas à m’en débarrasser. Elle est entrée dans ma tête et dans mon cœur. C’est le vent mauvais qui l’apporte, cette fichue poussière qui jamais ne me lâche. »

Kaouther Adimi aborde des thèmes variés, excelle dans l’évolution de ses personnages (celui de Tarek, splendide). La guerre,  l’exil…
Le personnage de Saïd, un peu moins détaillé, nous permet d’apprécier l’importance de  la littérature.
Un beau roman, passionnant, passionné dont je retiendrai aussi le travail sur les personnages.

Au vent mauvais par Adimi

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Premières lignes – 12/12

 

Premières lignes 

 

J’avais entendu parler de La bibliothèque de minuit et, puisqu’il y était question de livres entre autres, j’avais envie de le lire. C’est chose faite.
Nous suivons Nora Seed, la trentaine, qui traverse une période dépressive et … décide de se suicider car elle estime avoir « raté sa vie ». Incroyable : elle ne meurt pas mais se retrouve dans un lieu qui ressemble à une bibliothèque, en compagnie Mme. Elm (la bibliothécaire qui l’avait aidée dans son collège). Nora comprend alors que quelque chose cloche. Mme. Elm  lui  propose de choisir une vie qu’elle aurait aimé vivre. Où ? Mais en choisissant l’un des nombreux livres présents ! Car il existe  une multitude de vies parallèles avec des possibles multiples…
C’était une idée de départ et, même si je n’ai pas apprécié du tout que le thème du suicide soit abordé de façon aussi légère, j’ai accroché au concept. D’ailleurs, l’indice des univers parallèles se trouve dans la vie (la première) de Nora puisqu’elle travaille dans une boutique nommée La Théorie des Cordes — lesdites cordes ne faisant référence qu’à celles des instruments mais à la physique quantique (dont la possibilité de l’existence des univers parallèles).
J’ai continué avec l’exploration des « premières vies » et je me suis assez vite lassée. Le reste est une répétition sans beaucoup d’imagination, assez moralisatrice (« attention, là, elle en fait trop, elle va avoir des problèmes… » la vilaine est devenue célèbre et pas sympa ! tiens, elle prend de la drogue, c’est pas bien » etc, etc..). On a compris où voulait en venir l’auteur et il ne fait pas dans la délicatesse. Pour dire les choses clairement, le message est lourdingue.
Et puis, on se demande quel est le sens de tout ça : parmi ce que Nora aurait pu faire ou devenir, il y a   star de rock, glaciologue, nageuse olympique, mère de famille ou baroudeuse… Mais non, elle n’a rien fait de tout ça, rappelez-vous : à tout juste 35 ans, elle a raté sa vie, nous a dit l’auteur. Mais qui a décidé qu’une vie était ratée ? et selon quels critères ?
Bref, on comprend vite aussi quelle va être la fin (heureuse, bien entendu).
J’ai fini le roman, un peu agacée. Je tiens quand même à  parler du fait que la dépression de Nora soit aussi mal abordée. Quant au fait que se suicider puisse être résolu par un effet pseudo-magique, ça m’a mise mal à l’aise. La dépression tue et ne se règle pas avec des conseils sortis de ce genre de bouquin – ni même avec une montagne de bouquins, seraient-ils issus d’une bibliothèque de minuit…

La bibliothèque de minuit par Haig

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Premières lignes – 7 déc

 

Premières lignes 

 » Mme. Habib sur le trottoir, en chemisier malgré le froid, tend le bras pour éloigner sa cigarette, l’autre est replié sous sa poitrine. A la fois raide et frissonnante, elle examine la vitrine de son salon comme si elle cherchait à en percer le mystère. Les lettres blanches de l’enseigne, l’immense poster sur lequel une femme coiffée comme Louise Brooks a l’air de regarder ses pieds, la liste d s tarifs sur la porte en verre. Et, à l’autre extrémité; tout en bas, inutile et solitaire dans son vase transparent, une tige de bambou qui n’a jamais poussé de plus d’un centimètre.
— C’est le nom qui ne va pas. Cindy. la fille de l’ancien propriétaire s’appelait comme ça. C’était à la mode en 1982 mais aujourd’hui ça ne dit plus rien à personne. « 

Clara travaille au salon Cindy coiffure qui appartient à Mme. Habib en compagnie de Nolwenn. Elle mène une vie de routine. Tous les jours, les mêmes personnes, clients ou pas,  passent discuter avec Mme.Habib qui les écoute. Nolwenn se trompe un peu dans ses coupes, au grand dam de la patronne qui la reprend,  raconte comment elle a encore raté son permis de conduire.
Clara a une vie tranquille qu’elle partage avec JB, le sosie de Flynn  Rider (dans Raiponce ). Tout le monde lui conseille de ne pas lâcher ce gars ; il est bien pour elle, il exerce le métier de pompier, il a tout pour plaire. D’ailleurs, c’est aussi l’avis des parents de Clara qui attendent le mariage des deux jeunes gens. Clara est jeune (23).
Et sans le savoir elle-même, elle s’ennuie…
Un jour, un client qu’elle n’avait jamais vu (le salon est mixte) vient pour une coupe. Il laisse un livre. Elle n’a pas le temps de lui redonner, l’empoche et n’y prête pas attention pendant quelques mois.
Jusqu’au jour où, désoeuvrée, elle ouvre le livre. C’est une édition de poche de Marcel Proust qu’on peut tous et toutes avoir en tête.

Au début, Clara ne sait que penser de sa lecture : les phrases sont longues (Proust, n’est-ce pas?). Et puis, elle a perdu l’habitude de lire. Mais finalement, elle s’immerge dans ce premier tome, commande le second  à la librairie de la ville et entame un long processus qui annonce un changement. Ou un accomplissement.

Clara lit Proust est un roman bien construit, qui observe les relations entre les gens, les petits gestes du quotidien avec une acuité étonnante. C’est bien écrit, souvent amusant et tendre. J’ai vraiment apprécié ce roman qui m’a presque donné envie de relire Proust (quelque chose que je n’ai pas fait depuis mes études).
Une jolie madeleine que je conseille.

Clara lit Proust par Carlier