Premières lignes
Il s’agit d’un essai, « Travestissements. Performances culturelles du genre », ou plus exactement d’un ouvrage rassemblant 12 essais autour du « travestissement » (cross-dressing en anglais) en s’appuyant plutôt sur « performances culturelles de genre » (avec des exemples dans le spectacle, par ex). Les deux directrices, Fanny Lignon, experte des questions de genre dans l’univers des médias et Anne Castaing, spécialiste des problématiques de genre dans la culture indienne, ont séparé le livre en 3 parties, proposant différents axes de réflexion sur les fonctions du travestissement.
Car pratiquer le travestissement, qu’est-ce ? L’identité de genre est-elle indissociable ou pas des vêtements adoptés ?
On peut distinguer 3 sortes de travestissements :
— un « ludique », c’est celui du déguisement, lors de fêtes à thème, de carnavals, par ex., — celui de « commodité» : quand une femme porte des vêtements considérés comme masculins dans un contexte spécifique : guerrières engagées dans une mission, recluses ou ermites, « saintes-travesties », basha-posh ou burrnesha (vierge jurée) En Albanie (il y a eu un excellent documentaire sur les vierges sous serment qui avait été diffusé sur Arte, je pense).
— enfin, le travestissement transgressif.
Ce dernier, que l’on retrouve dans les pratiques culturelles, interroge le lien entre genre, culture et performance et questionne en profondeur.
Car, dès le premier texte, on réalise qu’on dit qu’une femme porte un pantalon mais qu’un homme se travestit avec une jupe ou une robe. (analyse historique du travestissement vestimentaire par Élizabeth Fischer : Le monde pour un pantalon).
On découvre aussi dans cette 1ère partie l’histoire d’Hildegonde, une religieuse déguisée en moine au XIIe siècle , alors nommée frère Joseph, dont le sexe biologique sera découvert après son décès (Chloé Maillet)
J’ai particulièrement apprécié la troisième partie, même si tout est intéressant mais serait très long à détailler. La « subversion punk » (puis New Wave et post-punk) a brouillé les codes. Tellement que des émissions de télé s’inquiétait des jeunes qui devenaient punks. Captain Sensible des Damned débarque en tutu sur scène (on est en 77)
Avant cela, les pré-punks, New York Dolls chantent :
« And you’re a prima ballerina on a spring afternoon
Change on into the wolfman howlin’ at the moon, ooh
Got a personality crisis, you got it while it was hot »
Et chez les femmes punks ? Ici, en 77, le groupe L.U.V (français).
Si certains passages peuvent paraître ardus, d’autres sont tout à fait abordables sans se creuser les méninges. On peut piocher ce qu’on y veut parmi les thèmes.
Une vraie découverte que je recommande aux personnes que ces questions intéressent.
Anne Castaing, Fanny Lignon (dir.), Travestissements. Performances culturelles du genre, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, coll. « Penser le genre », 2020, 184 p.
Ludique, fonctionnel ou identitaire, transgressif ou spectaculaire ?: si le travestissement recouvre différents phénomènes, certains banalisés et d’autres marginaux, il permet d’interroger le lien entre genre, culture et performance. Les contributions réunies dans cet ouvrage proposent à partir de terrains et de pratiques diverses un état des lieux des réflexions actuelles sur les travestissements et leur fonction symbolique et/ou politique.
Histoire culturelle, anthropologie, arts du spectacle et sociologie ; télévision, cinéma, littérature, musique sont ainsi mobilisés pour explorer différents lieux et «lisières» de la culture et penser le genre en tant que pratique singulière et mouvante.
Les blogueurs et blogueuses qui y participent aussi :