Premières lignes – 11 octobre

Premières lignes

« Introduction — Hiver
Il va sans doute bientôt neiger. elle regardera cette première neige par la fenêtre de sa chambre d’hôpital.
Je peux l’imaginer quittant son lit, glissant ses pieds dans ses pantoufles et s’approchant lentement de la fenêtre. je vois son petit visage pâle, le front qu’elle appuie contre la vitre froide, son visage sans expression ; elle aura enfoncé ses mains aux poignets fragiles dans les poches de son pyjama d’hôpital trop grand pour elle. Et quand elle se penchera vers la fenêtre en clignant des yeux, abaissant ses longs cils brillants qu’on dirait humides, le pendentif orné d’un griffon, suspendu à une chaîne d’argent fine effleurera sa clavicule. « 

Encouragez donc les garçons ! par Eun

 

Avec ce roman de Eun Hee-kyung  direction la Corée du Sud. Publié en 2010, 소년을 위로해줘, « Console le jeune garçon » (on voit déjà qu’il y a un problème de traduction mais je vais y revenir) est un beau roman sur l’adolescence, sur le fait de grandir, de trouver sa place dans la société la pression sociale, sur le fait d’être différent.e, sur l’amour, l’amitié, le manque de repères et comment s’en créer, la paternité, la maternité aussi, ….
On a là un roman d’apprentissage avec beaucoup de thèmes abordés au travers de l’histoire Yeonwu qui vit seul avec sa mère. Ce n’est pas fréquent en Corée et il en souffre. Il n’a pas connu son père. La mère et le fils accompagnés de leurs deux chats emménagent dans un nouvel appartement. Yeonwu va intégrer un nouveau lycée avec la pression que cela comporte : les examens, les heures de classes supplémentaires et obligatoires pour les préparer — nous n’avons aucune idée de la charge que cela représente, ici, en France. Lorsque les lycéens s’y soustraient, ils reçoivent des punitions qui peuvent être des châtiments physiques (oui, on les frappe et ceci est considéré comme « normal » dans la mesure où le prof ne frappe pas trop fort) ou bien des humiliations (porter une pancarte toute une journée indiquant que vous avez séché le cours et marquant votre honte – ce qui est particulièrement insupportable en Asie). Chaeyeong, la jeune fille dont Yeonwu va devenir l’ami, va subir ces punitions. Taesu, le troisième larron de la petite bande, revient des USA où ses parents ont vécu. Il a étudié là-bas et émaille ses phrases d’expressions américaines. Il a du mal à se réadapter aux critères coréens au grand désespoir de sa jeune soeur et de sa famille. En gros, il devient le vilain petit canard. Taesu et Yeonwu partagent le même goût pour la musique et surtout pour le rap. Ils vivent sur ce rythme.

Mais on ne suit pas que les adolescents ; les soucis d’adaptation concernent aussi la mère de Yeonwu, Mina,  et son petit-ami, Jaeuk, plus jeune qu’elle. Voilà une situation qui n’est pas correcte : elle est une femme divorcée qui ne « rentre pas dans les cases » , et elle sort avec un homme plus jeune, sans vouloir se marier. Absolument pas coréen. Sans parler du fait que Jaeuk n’a pas d’emploi respectable dans une grande entreprise !
Pour autant, la génération des parents ne comprend pas celle des enfants. Mina, déjà en rupture avec la tradition a du mal avec Yeonwu. Et même Jaeuk qui essaie d’être ami avec lui, l’entraînant à la course à pied, se révèle être un grand moralisateur. Tout le monde cherche ses repères et a bien du mal à les trouver dans une Corée qui est tiraillée constamment entre le passé rigide, les exigences de performance et ce qui se profile. C’est vraiment très intéressant. Et comme je m’intéresse à l’Asie ; au Japon depuis longtemps ( les années 80 grâce à mes parents ) et à la Corée du Sud depuis quelques années seulement (merci la K-pop, je n’ai pas honte de le dire) , je n’ai pas été surprise.
J’ai aimé aussi les personnages, les touches délicates pour entrer dans l’histoire, la poésie qui se dégage.
Par contre, le roman souffre d’un très gros problème que j’évoquais dès le début : la traduction est une catastrophe de même que la mise en page à certains moments (les dialogues délimités n’importe comment). Il y  a aussi des fautes de frappe, des erreurs de français qui rendent la lecture difficile. Parfois, j’ai dû relire plusieurs fois le même passage pour comprendre le sens. On sent que la traduction est très littérale. Je sais que le coréen n’est pas facile à traduire, à la base (pour un aperçu de la structure de la phrase coréenne, c’est par ici).  Parfois cela donne de drôles d’interprétations, voire plusieurs nuances quand on le passe dans notre langue mais ce n’est pas une raison. C’est compliqué de lire un texte qui n’a pas vraiment de sens… Sans cela, Encouragez donc les garçons — le titre ne correspond d’ailleurs à rien puisqu’il est inexact — serait un très bon roman. Et c’est pourquoi il est à lire. En tout cas, j’ai découvert une autrice à suivre.

Résumé : Yeonwu vit seul avec sa mère depuis le divorce de ses parents. Après leur déménagement, il fait la connaissance de Taesu, futur camarade de classe. La musique qui s’échappe du casque de ce dernier, son cœur qui bat sur ce rythme, c’est le début de tout. Nouvelle amitié, rencontre avec Chaeyeong, fille craintive, premiers émois, premier amour, séparation forcée, retrouvailles… De l’été à l’hiver, puis de l’hiver au printemps… À travers ce roman d’apprentissage dans l’hyper-modernité sud-coréenne, l’auteure dresse un portrait sans complaisance de la génération des parents des protagonistes, dont certains ont rompu avec les traditions familiales et d’autres  se satisfont de leur rôle social, tandis que leurs enfants, n’ayant plus de repères solides, sont à la recherche d’eux-mêmes. Portait d’une jeunesse qui communie dans la même musique et le même rêve d’un monde autre, rêve qui peut conduire aussi à des choix dramatiques.

Publié en 2010 en Corée du Sud. Editions Atelier des Cahiers 

Lire ce roman m’a fait énormément penser au manhwa de Park Hee-Jung, qui date de 2004/2005 et qui parle d’adolescents coréens à la dérive (harcèlement, etc…). La série s’appelle Fever — on ne la trouve que d’occasion.

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