Premières lignes — 25 avril

Premières lignes 

 » Le 21 septembre 1989, les habitants de l’île Blackney, au large d el’archipel des Mariannes, ont disparu sans laisser de traces. Cinq-cent-quarante-six hommes, femmes et enfants, volatilisés sans que l’on ne trouve aucun corps, ni aucun signe de violence. Les premiers à donner l’alerte furent les membres de la mission Sentinelles, dépêchés depuis plusieurs années par le CNRS afin d’établir le contact avec cette population isolée. A leur tête, les professeurs Henri Luzarche, ethnologue, Adma Redouté, botaniste, et Mareve Temauri, historienne spécialiste du peuplement des îles d’Océanie.
Blackney était une énigme, bien avant de devenir un mythe. »

Je dois dire que j’étais vraiment impatiente de découvrir Into the deep, deuxième roman de Sophie Griselle, publié chez Snag éditions et ceci pour plusieurs raisons :
j’ai découvert  Sophie sur la plateforme Wattpad, où j’avais décidé un beau jour de  mettre en ligne quelques unes de mes  (anciennes) fan fictions . Wattpad étant assez inégal, elle réserve parfois de bonnes surprises: la preuve. J’avais donc lu le tout début de Into the deep en ligne. Mais c’est surtout la qualité de l’écriture de Sophie, son exploration de l’âme humaine dans ses réinterprétations des personnages de l’univers de Harry Potter ou même de Star Wars (le très beau,  Irrépressible ). 

Into the deep  s’attache donc à nous entraîner dans une expédition scientifique, dans la fosse des Mariannes,  le point le plus profond de la croûte terrestre, dans le Pacifique. Toutes les informations fournies dans le roman sont rigoureuses et vérifiables ; comme je suis une grande curieuse, je me régalée à croiser ce qui relevait de la vérité et de la pure fiction… C’est d’ailleurs l’un des points forts de ce livre : le travail de documentation effectué. Et ce qui est plus important encore, c’est que les renseignements, la partie scientifique n’empiète pas sur le côté merveilleux ou sur l’intrigue comme cela peut arriver. Un très bon point.
On oscille donc entre science, imaginaire, fantastique, sans jamais basculer vraiment dans la SF (je ne vois pas en quoi le terme SF se justifierait, en fait)
En fait, Into the deep explore tout autant les abysses que les tréfonds de l’âme humaine puisque nous suivons Sam, jeune chercheur, tourmenté par le suicide de sa mère (la scientifique Marève Temauri) alors qu’il était tout enfant. Il a toujours vécu dans l’ombre d’un père brillant, Henri Luzarche et aimerait faire ses preuves, voire surpasser ce parent encombrant (masculinité toxique  en vue avec les Luzarche père et fils). Sam dirige une nouvelle expédition dans la fosse des Mariannes. Il travaille avec la très compétente Ophélie, qui est aussi sa petite amie ; un personnage féminin qui cherche sa place et a tendance à s’effacer dans toute une partie du livre (mais cela ne durera pas). 
Un jour, Sam, toujours à la limite, presque en perdition, tombe nez à nez avec une créature. Et pour en revenir au fantastique, et  sans rien divulguer de l’intrigue, tout ce qui touche aux créatures n’appartient pas à la SF  puisque ce ne sont pas des aliens ou des E.T, mais des êtres légendaires, liés à des mythes. Sam va vouloir retrouver sa « sirène » à tout prix, même s’il doit plonger au fond de la fosse et y entraîner son équipe. On voit la détermination du jeune homme mais aussi l’absence de scrupules, et les pulsions autodestructrices… On  y assiste avec inquiétude.
Le roman suit le point de vue de Sam, ses doutes, ses tourments, ses interrogations, ses angoisses,…
Au passage plusieurs thèmes sont abordés, comme, par ex.,  l’éthique scientifique, la reconnaissance des droits des autres espèces (qui est sentient ? ou pas?), la reconnaissance des femmes dans le milieu scientifique (au travers d’Ophélie) et bien sûr, la nature de l’être humain. 
Je dois quand même nuancer mon avis avec deux petites remarques : (sinon, le roman serait parfait)
— le milieu (à peu près) du roman s’éternise sur des dialogues assez redondants qui n’apportent pas grand chose  à la psychologie des personnages. Et qui nuisent un peu à l’avancée de l’intrigue. Un tout petit peu moins de « je me sens coupable de… », « c’est de ta faute, père », un peu plus d’action et cela aurait été très juste.
— presque dans le même ordre d’idées, je n’ai pas été surprise un instant par « la » révélation qui est très préparée, en fait. J’ai peut-être trop lu de thrillers et de policiers, c’est possible. Ou alors, il m’a manqué un petit quelque chose pour trouver le dénouement original.
Mais ce n’est pas très grave car pour moi, c’est un bon roman, bien construit, bien écrit, avec  500 pages qui se lisent avec délice ;  l’écriture de Sophie Griselle est un régal.
Il ne faut donc pas hésiter et prendre son souffle : vous en aurez besoin, c’est une plongée en apnée.

Résumé : À plus de onze mille mètres de fond, la fosse océanique des Mariannes, au large de l’océan Pacifique : l’endroit le plus profond sur Terre…
C’est là que Sam Luzarche, jeune océanologue, découvre une créature qui pourrait bien remettre en question tout ce qu’il croyait savoir sur la science, sur les fonds marins et, en définitive, sur lui-même.

Into the deep par Griselle

Sophie Griselle, Into the deep

Snag Fiction, avril 2022

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